L'Amérique juge le Général de Gaulle

L’union fait la force

Les rapports entre les Etats-Unis d’Amérique et le Général de Gaulle ne furent jamais un long fleuve tranquille bien que, à chaque fois que l’intérêt supérieur du Monde libre était en cause, les Américains ont pu compter sur le soutien indéfectible du Général.

Nous avons choisi la voix d’Henry Kissinger pour parler au nom de l’Amérique. Il a réalisé une somme impressionnante sur les relations internationales depuis Richelieu jusqu’à nos jours (Diplomatie aux éditions Fayard) et juge le Général plutôt positivement :

« De Gaulle n’était pas antiaméricain par principe. Il entendait coopérer chaque fois qu’il estimait que les intérêts de la France et de l’Amérique convergeaient réellement. Pendant la crise des missiles de Cuba , les responsables américains furent stupéfaits de l’appui sans réserve du général – le plus inconditionnel que leur ait accordé un dirigeant allié. Et il s’opposa aux divers projets de désengagement en Europe centrale parce qu’ils auraient trop éloigné les forces américaines et trop rapproché l’armée soviétique »

La relation entre le Général et l’Amérique relève beaucoup du paternalisme que la prestigieuse Histoire de la France autorise.

Ainsi, lors des deux seuls grands égarements de l’Amérique il y eu une voix gaulliste pour la rappeler à ses devoirs de nation civilisée : celle du Général lors de la guerre du Viet-Nam et celle de Jacques Chirac lors du conflit en Irak.

Lorsque le Général reçoit John Fitgerald Kennedy le 31 mai 1961 à Paris il le conseille à propos de la future intervention des Etats-Unis au Viet-Nam :

« Pour vous , l’intervention dans cette région sera un engrenage sans fin. A partir du moment où des nations se sont éveillées, aucune autorité étrangère, quels que soient ses moyens, n’a de de chance de s’y imposer. Vous allez vous en apercevoir. Car, si vous trouvez sur place des gouvernements qui, par intérêt, consentent à vous obéir, les peuples, eux, n’y consentent pas et, d’ailleurs ne vous appellent pas. L’idéologie que vous invoquez n’y changera rien. Bien plus, les masses la confondront avec votre volonté de puissance. C’est pourquoi, plus vous vous engagerez là-bas contre le communisme, plus les communistes apparaîtront comme les champions de l’indépendance nationale, plus ils recevront de concours et, d’abord celui du désespoir. Nous , Français, en avons fait l’expérience. Vous, les Américains, avez voulu,hier, prendre notre place en Indochine. Vous voulez, maintenant, y prendre notre suite pour rallumer une guerre que nous avons terminée. Je vous prédis que vous irez vous enlisant pas à pas dans un bourbier militaire et politique sans fond, malgré les pertes et les dépenses que vous pourrez y prodiguer. Ce que vous, nous et d’autres devons faire dans cette malheureuse Asie, ce n’est pas de nous substituer aux Etats sur leur propre sol, mais c’est de leur fournir de quoi sortir de leur misère et de l’humiliation qui sont, là comme ailleurs, les causes des régimes totalitaires. Je vous le dis au nom de notre Occident »

Henry Kissinger confirme cette version des faits dans son ouvrage : « nous nous rencontrâmes pour la première fois à l’occasion de la visite de Nixon à Paris, en mars 1969. À l'Elysée, où l’on donnait une grande réception, un conseiller me repéra dans la foule et vint me dire que le général voulait me parler. Quelque peu intimidé, je m’approchai de la haute silhouette. En me voyant , il me lança tout à trac : « Pourquoi ne partez-vous pas du Viêt-Nam ? » Un peu embarrassé, je répondis qu'un retrait unilatéral démolirait la crédibilité américaine. »

Henry Kissinger conclut que la coopération entre la France et l’Amérique, ces deux adversaires et amis séculaires apparaît comme la clef de l’équilibre.

Puisse à nouveau se réunir le camp de la Paix et le camp de la guerre pour assurer notre Avenir dans la Paix.

Jean-Marie BRUNEEL
Le Rassemblement pour l’Europe
La Bruyère

Décembre 2004